Que reste-t-il de la soul ? Après l’âge d’or des années 60, les seventies voient l’arrivée de la funk puis du disco. Le son se fait de plus en plus synthétique, l’évolution musicale suit son cours et la soul disparaît des radars.
Il faut attendre la fin des années 90 pour que le genre fasse à nouveau parler de lui. Tandis que D’Angelo, Erykah Badu et quelques autres développent une nu soul fermement ancrée dans son époque, quelques hipsters mélomanes basés à Brooklyn défendent une approche littéraliste de la soul. Ces adeptes de l’analogique qui révèrent la soul classique des sixties ramènent ce son vintage sur le devant de la scène. C’est le cas de l’américain Gabriel Roth et du français Philippe Lehman. Ensemble, les deux compères créent Desco Records, avant de se séparer et de lancer Daptone et Truth & Soul chacun de leur côté. Ces deux labels deviennent les porte-étendards de cette scène bientôt qualifiée de « retro soul ».
Influencées par leurs glorieuses références, les deux maisons de disques n’en sont pas pour autant prisonnières. C’est surtout grâce au talent de musiciens comme les Dap-Kings et de compositeurs comme Leon Michels et Tom Brenneck, qui créent des œuvres originales s’inspirant de la soul originelle sans tomber dans les écueils de la reprise ou du plagiat.
Aux côtés de ces jeunes puristes brooklynites, quelques interprètes à la quarantaine bien tapée entrent enfin dans la lumière. Arrivés à maturité en plein creux de la vague soul, ils ont longtemps dû mettre de côté leurs rêves de carrière musicale pour subvenir à leurs besoins par d’autres moyens : tandis que Charles Bradley jouait les imitateurs de James Brown, Lee Fields était agent immobilier et Sharon Jones convoyeuse de fonds pour la Wells Fargo et gardienne de prison à la redoutée Rikers Island.
Francis Scott Fitzgerald écrivait qu’il n’y avait pas de deuxième acte dans les vies américaines, le scène retro soul offre pourtant une seconde chance à ces artistes qui avaient pour seul tort d’être nés à la mauvaise époque.
Entre ces quadras/quinquas et les hipsters newyorkais, une alchimie inattendue s’opère. La scène se développe tranquillement et elle accède même au succès planétaire grâce à une anglaise à fleur de peau et un producteur au nez creux : à la recherche d’un écrin vintage pour Amy Winehouse, Mark Ronson tape à la porte du studio de Daptone. Les Dap-Kings contribuent à 6 titres de l’album « Back To Black » et deviennent le groupe de tournée de l’anglaise.
Amy Winehouse est la partie émergée, sinon de l’iceberg, du moins du gros glaçon puisque la communauté artistique retro soul reste relativement restreinte. Malgré tout, le mouvement attire de nouveaux disciples ou en révèle d’anciens un peu partout dans le monde, parfois même dans les endroits les plus inattendus comme la Finlande, avec l’excellent label Timmion Records.
Nous vous avons concoté un mix de 2h rassemblant quelques-uns de nos morceaux favoris de cette scène retro soul à l’esthétique vintage et qui pourtant n’a pas encore atteint la vingtaine.
Retrouvez également le tracklist minuté du mix ci-dessous, ainsi que la playlist des morceaux de l’émission sur Spotify en bas de page.
Cliquez sur l’image ci-dessous pour ouvrir le lecteur de l’émission dans une autre fenêtre.
Tracklist :
03’46 : Amy Winehouse – « Rehab »
07’16 : Frootful – « Fish In The Sea (feat. Angeline Morrison) »
10’15 : Bobby Oroza – « Your Love Is Too Cold »
12’50 : The Mighty Sceptres – « I Found The Letter »
15’51 : Mayer Hawthorne – « Just Ain’t Gonna Work Out »
18’06 : Durand Jones & The Indications – « Morning In America »
21’42 : St. Paul & The Broken Bones – « Flow With It (You Got Me Feeling Like) »
24’54 : Myron & E – « Going In Circles »
29’09 : Menahan Street Band – « Tired Of Fighting »
32’29 : Kings Go Forth – « High On Your Love »
36’02 : Jonny Benavidez & Cold Diamond & Mink – « Tell Me That You Love Me »
39’05 : Cookin’ On 3 Burners – « This Girl (feat. Kylie Auldist) »
42’15 : Sharon Jones & The Dap-Kings – « How Long Do I Have To Wait For You? »
45’34 : Curtis Harding – « Face Your Fear »
48’42 : Carlton Jumel Smith – « Help Me (Save Me From Myself) »
52’01 : Black Pumas – « Know You Better »
55’14 : Badbadnotgood – « In Your Eyes (feat. Charlotte Day Wilson) »
58’51 : Vulfpeck – « Running Away (feat. Joey Dosik, David T. Walker & James Gadson) »
1h03’03 : El Michels Affair – « Musings To Myself »
1h06’11 : Eli « Paperboy » Reed & The True Loves – « (Am I Just) Fooling Myself »
1h10’53 : Clairy Browne & The Bangin’ Rackettes – « Far Too Late »
1h13’23 : Aloe Blacc – « I Need A Dollar »
1h16’53 : Lee Fields & The Expressions – « You’re The Kind Of Girl »
1h20’16 : Liam Bailey – « Please Love Me »
1h23’03 : Adrian Younge – « Anna May »
1h25’44 : Amy Winehouse – « Wake Up Alone »
1h29’20 : The Olympians – « Venus »
1h32’15 : Charles Bradley – « Golden Rule »
1h35’25 : Lady Wray – « Get Ready »
1h39’01 : Nicole Willis & The Soul Investigators – « If This Ain’t Love (Don’t Know What Is) »
1h41’54 : Michael Kiwanuka – « You Ain’t The Problem »
1h44’55 : Nicole Willis & The Soul Investigators – « Feeling Free »
1h48’04 : Raphael Saadiq – « Love That Girl »
1h50’50 : Sharon Jones & The Dap-Kings – « How Do I Let A Good Man Down? »
1h53’28 : Shirley Davis & The SilverBacks – « Two Worlds »
1 Ping