Pour tout passionné de musique, assister à la (re)découverte d’un disque longtemps occulté équivaut à rétablir une injustice historique. C’est le cas de l’album « Heart Of The Congos », sommet du reggae roots qui manqua de sombrer dans l’oubli.

Produit en 1977 dans ses studios de Kingston par un Lee ‘Scratch’ Perry au sommet de son art, « Heart Of The Congos » faillit ne pas voir le jour. Le génial farfadet jamaïcain envoya les bandes master du produit fini à Island Records, certain que le label publierait l’album et pourtant, les semaines passèrent sans qu’Island ne donne de date de sortie. Il existe de nombreuses légendes autour de cette non-commercialisation : certains pensent qu’Island refusa de sortir l’album du fait de la mauvaise qualité des bandes master, d’autres disent que le label ne voulait pas faire d’ombre à leur joyau Bob Marley. Si l’on en croit la rumeur, Lee Perry, révolté par l’embargo musical d’Island, alla lui-même dans les locaux du label pour voler les bandes master afin de pouvoir sortir l’album sur son label Black Ark. « Heart Of The Congos » bénéficia d’une sortie confidentielle de quelques centaines d’exemplaires à l’époque, des pressages originaux aussi rares que les apparitions des Daft et chassés comme le Yéti par les fans de reggae pendant 20 ans, avant la superbe réédition de cet album mythique par le label anglais Blood And Fire en 1997.

« Fisherman », le titre-phare de cet album, nous donne un aperçu de la remarquable complémentarité du falsetto Cedric Myton et du tenor Roy ‘Ashanti’ Johnson. C’est aussi l’occasion d’apprécier la technique archaïque de production sur 4 pistes de Lee Perry, qui donne à l’album ce son si caractéristique. Ceci dit, ce son pourrait aussi résulter d’une de ses autres techniques de production de l’époque, qui consistait à souffler la fumée de ses joints sur les bandes master pendant l’enregistrement. Les experts n’ont pas encore tranché ce point.

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