Dans la comédie humaine, les rapports père-fils occupent une place à part. Amour, rivalité, (ir)respect, admiration, déception, ressentiment… Les émotions que cette relation mobilise sont aussi puissantes qu’ambivalentes. Un thème on ne peut plus complexe, en somme… Dès lors, en ce jour de fête des pères, est-il bien raisonnable de confier un tel sujet à un artiste plus connu pour ses odes à ses cigarettes favorites et ses bandes-son instrumentales pour barbecue ?
Ne confondons pas légèreté et superficialité : le dilettantisme n’est que façade chez McBriare DeMarco. Si le canadien cultive un certain je-m’en-foutisme assumé dans son « slacker rock », c’est probablement pour mieux dissimuler ses vulnérabilités. Sur son dernier album « This Old Dog », sorti le 5 mai dernier, Mac DeMarco s’aventure plus loin sur le chemin personnel de sa relation (ou plutôt de son inexistence) avec un père absent, en proie aux démons de l’alcool et de la drogue. On connaissait ses chansons caustiques et hilarantes sur Mac Senior accro au crystal meth, DeMarco revient cette fois avec des textes qui, s’ils n’abandonnent pas toute tentative d’humour, se font plus introspectifs. « This Old Dog » est un album qui lui fut largement inspiré par de graves soucis de santé de son père, forçant le fils à regarder la réalité en face et à faire l’inventaire de leur relation.
« My Old Man » est une ballade lo-fi estivale faussement naïve sur laquelle Mac DeMarco s’étonne, mi-surpris mi-inquiet, de la ressemblance grandissante entre son père et lui. Le canadien y décrit la douce ironie de s’être construit en opposition à ce que son père absent représentait, pour finalement être rattrapé par la part paternelle qu’il porte en lui et leur lien inextricable. Loin de l’acte d’accusation déguisé qu’était la « Lettre Au Père » de Kafka, « My Old Man » est une ode douce-amère toute en nuances, l’intéressé prenant les choses avec philosophie et un certain détachement, comme toujours.