A entendre leur funk bubblegum ensoleillé, on les croirait venus tout droit des côtes californiennes. Pourtant, c’est sur les bancs de l’école de musique de l’Université du Michigan que se sont rencontrés Jack Stratton (guitare, clavier, batterie), Theo Katzman (guitare, chant, batterie), Woody Goss (clavier) et Joe Dart (basse). Outre l’humour potache et le ton décalé, les bougres partagent une absolue révérence des mêmes références : ils vouent une admiration sans bornes aux musiciens de session américains des années 60 comme les Funk Brothers de la Motown, le Wrecking Crew de L.A. ou les Swampers de Muscle Shoals. A l’image de ces historiques escouades, les 4 larrons créent Vulfpeck, collectif virtuose à consonance germanique composé de leur noyau dur autour duquel gravitent quelques contributeurs réguliers comme Cory Wong, Antwaun Stanley, Christine Hucal, Charles Jones, et Joey Dosik (dont nous reparlerons plus bas). Une grande et belle famille d’adoption, menée par ces geeks obsédés par le son (au point de créer et vendre un compresseur de leur invention, ou encore un livre compilant des représentations graphiques de leurs rythmiques préférées). Le public de Vulfpeck est d’ailleurs à l’image du groupe, aussi geek que mélomane, capable de chanter en chœur une ligne de basse nébuleuse de Joe Dart ou de faire des polyphonies à 3 voix sur le refrain de « Back Pocket ». Pas vraiment le public de Michel Sardou…

Sur leur 3e album « Mr. Finish Line », sorti en novembre dernier, on retrouve à nouveau leur funk candide patenté, mais aussi des explorations sonores heureuses allant de la composition instrumentale qui n’aurait pas dénoté comme générique d’un sitcom US des années 80 (ce qui n’est pas péjoratif sous notre plume) à un hommage à peine déguisé au  « Jealous Guy » de Donny Hathaway.

Point d’orgue de l’album, le merveilleux « Running Away », notre morceau du jour. Cette ballade soul intimiste qui figurait dans le répertoire du membre de la famille élargie Joey Dosik depuis quelques années bénéficie ici d’un relooking ambitieux grâce aux contributions de Vulfpeck et de 2 invités de marque : le mythique maître du groove James Gadson à la batterie et David T. Walker (Jackson 5, Stevie Wonder…) à la guitare. Les harmonies subtiles et aériennes de la composition sont sublimées par ce traitement soul vintage, Joey Dosik use de sa voix aussi chaleureuse que les accords de son Wurlitzer pour vous attendrir et les back vocals achèvent de vous donner la chair de poule : un véritable baume réparateur pour l’âme, un pur instant de bliss auditif…
Vulfpeck est rompu à l’exercice de l’autopromotion à l’ère numérique et sait se mettre en scène : par le biais de la vidéo qui figure en bas de cet article, le groupe nous ouvre les portes de la session d’enregistrement qui donna naissance à ce morceau. Pour notre plus grand plaisir, nous sommes les témoins muets de cette session à l’ancienne, et de l’osmose entre jeunes virtuoses aux vieilles âmes et vétérans encore verts dans la création d’un bijou soul  sans âge puisque intemporel.
Talentueux, affable, bien mis de sa personne, le jeune Dosik semble également être fan de basket si l’on en juge par ses T-shirts des Lakers et de la Dream Team, ou son « Game Winner » qui évoque des métaphores du monde de la balle orange. Soul et basketball, chez Flagrant Soul, forcément ça nous parle. Aucune faute de goût donc : ce jeune homme en deviendrait presque agaçant… Dernière précision pour nos ami(e)s parisien(ne)s amateur(e)s de soul, Joey Dosik viendra présenter son EP « Game Winner » en live le 19 mai prochain au Pop-Up du Label.

Sur ce, on vous souhaite un excellent dimanche, quel que soit votre programme du jour. Pour notre part, on ne sera pas loin de nos enceintes, agitant la tête avec un sourire de benêt aux lèvres, un de ces petits plaisirs simples que la vie sait nous offrir.

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