Le morceau du jour est autant affaire d’opportunisme que de ponctualité. A l’origine, « None Shall Escape The Judgement » est un titre de 1973 produit par Bunny Lee et chanté par Earl Zero, avec Johnny Clarke dans le rôle de choriste. Une fois enregistré, Lee transmet la bande à Sid Bucknor, l’ingé son du studio Treasure Isle, afin que ce dernier y surajoute la touche personnelle du moment du producteur, cette toute nouvelle « flying cymbal » à contretemps appelée à faire fureur dans les années à venir. Mais si la « cymbale volante » est bien là suite au transfert de la bande sur le 4 pistes, la voix d’Earl Zero, elle, s’est mystérieusement volatilisée.
Pour expliquer cette disparition, certains accréditent la thèse de l’accident. D’autres avancent que Bunny Lee n’était pas particulièrement fan de la voix d’Earl Zero et qu’il décida de la remplacer. La préférence de « Striker » Lee va à la voix haut perchée de Cornel Campbell, mais ce dernier se fait désirer. Frustré par cette longue attente, le producteur perd patience. C’est alors que Johnny Clarke, présent à ce moment-là au studio, se porte volontaire. Il a l’avantage de connaître les paroles de la version originale, qu’il a apprises lorsqu’il en a fait les chœurs. Clarke enregistre au pied levé, et en une prise, cette nouvelle version est dans la boîte. Cette première collaboration entre Johnny Clarke et Bunny Lee en appellera de nombreuses autres les années suivantes, et reste à ce jour le plus grand succès du chanteur.
« None Shall Escape The Judgement », sorti en 1974, est un morceau roots uptempo porté par la voix soyeuse et sinueuse de Johnny Clarke et la suspension de cette « cymbale volante » qui donne rétrospectivement à ce titre des accents disco.