Un héraut très discret. En ce début des années 70, le nom d’Arthur Verocai reste peut-être inconnu du grand public brésilien, mais le producteur/compositeur/guitariste à la silhouette longiligne n’en a pas moins marqué la musique brésilienne contemporaine de sa touche feutrée. Arrangeur prisé, il travaille avec Gal Costa, Ivan Lins, Jorge Ben, Marcos Valle, Quarteto Em Cy, MPB4 et bien d’autres, imposant sa présence en filigrane sur quelques-uns des plus grands enregistrements brésiliens de cette période. Précis et lyriques, ses arrangements témoignent autant de sa formation d’ingénieur civil que de sa vocation d’artiste, et confèrent un regain de noblesse et de raffinement à une musique brésilienne qui pensait pourtant ne pas en manquer. Trouvera-t-on un jour les mots pour faire justice à ces cordes à tomber sur « Zula » ?

Après avoir joué les éminences grises auprès des plus grands, il a enfin la possibilité de sortir de l’ombre en 1972 lorsque le label Continental lui propose de commercialiser un album solo avec ses propres compositions. Verocai saisit cette occasion pour poursuivre son travail d’exploration avec des œuvres fortement influencées par la musique instrumentale, lui dont les rêves de musiques de films n’ont pas été assouvis par son travail de composition pour la TV brésilienne. Son album solo « Arthur Verocai » dévoile des compositions aussi complexes qu’élégantes qui naviguent sans efforts entre jazz, funk et musique populaire brésilienne. Malgré la sueur et les espoirs de Verocai, la sortie de l’album passe inaperçue. Cet échec critique et commercial le convainc de l’impossibilité de rencontrer le succès sans dénaturer ses compositions. Il abandonne sa carrière solo pour la musique publicitaire, délaissant ses nobles aspirations au profit d’une conception plus utilitaire de la musique qui l’amène à concevoir des albums pour des marques comme Fanta (soda), Brahma (bière), Petrobras (pétrole) et Souza Cruz (tabac). Que tristeza
Le chapitre n’est pas clos puisque son album éponyme est redécouvert dans les années 2000 par les diggers et amateurs de rare groove, entraînant sa réédition en 2003 par le label Luv N Haight. « Arthur Verocai » s’offre un nouveau rendez-vous inespéré avec son public, et l’artiste se découvre de nouveaux et prestigieux admirateurs, parmi lesquels Cut Chemist, MF Doom et Madlib, qui aurait confessé pouvoir écouter cet album en boucle jusqu’à ce que mort s’ensuive. Au final, l’élégant Verocai n’aura commis qu’une seule faute de goût, celle d’être en avance sur son temps.

« Sylvia », notre morceau du jour, aurait tout aussi bien pu figurer dans notre rubrique « Soulful Sundays » tant cette œuvre instrumentale réalise la synthèse entre soul et musique tropicale. La section rythmique et la guitare donnent à ce morceau cinématique son ancrage brésilien, les cordes luxurieuses (12 violons, 4 altos, 4 violoncelles) et la flûte traversière l’emmenant vers d’autres sphères.

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